Akiyo KAJIWARA 梶原章代
9 juin 2022Kentaro Sakai 堺 憲太郎
24 octobre 2022Faire la photo avec Laurent était une évidence. Il est mon patron, mon associé et mon ami.
Je m’appelle Kohei Ohata, j’ai quarante deux ans cette année. Je suis chef de cuisine à l’hôtel Belesso en Provence et j’ai trois restaurants japonais avec mon patron qui est devenu mon associé pour l’occasion.
Je suis né et j’ai grandi à Tokyo, où j’ai travaillé dans un restaurant français.
Un jour, j’ai eu envie de venir en France pour découvrir comment on y cuisinait. Avec mon visa vacances-travail, je pensais rester un an, et cela fait treize ans que je suis là ! Je ne sais pas trop pourquoi j’aime la France, pour la culture, pour les gens, parce qu’ils sont vivants.
J’ai très vite trouvé du travail dans un restaurant étoilé à Paris. Au début, c’était dur, il y avait beaucoup de travail, parler français était difficile, même si je le parlais un peu au Japon avec mes amis français. Maintenant ce n’est plus un problème, surtout quand je suis en cuisine.
Je me rappelle très bien du jour de mon arrivée, c'était un quinze août. Je me vois encore rue de Rivoli, avec ma petite valise, personne dans la rue et tous les magasins fermés. Je pensais tout acheter sur place, c’était raté. A Tokyo, tout est toujours ouvert, je n’imaginais pas que Paris puisse être si différent.
Après trois années, je suis parti en Bretagne, car je voulais travailler pour Patrick Jeffroy, un chef étoilé français que j’aimais bien et qui était connu au Japon. J’ai déposé un CV et voilà.
La région était belle, mais la météo, surtout l'hiver, j'aimais moins. Alors je suis retourné à Paris au bout d’un an.
J’ai été chef dans un petit restaurant français près de la cathédrale de Notre Dame. Un jour, un client, content de ma cuisine, m’a proposé de le rejoindre à Marseille, où il avait un restaurant.
Six mois plus tard, j’arrivais dans le Sud. J’ai travaillé trois ans pour lui, mais Marseille, j’avais envie d’en partir. Ensuite, j’ai trouvé du travail dans un hôtel cinq étoiles aux Baux de Provence, jusqu’à ma rencontre en 2017 avec Laurent et Monika.
Ils avaient racheté et entièrement rénové un hôtel-restaurant à Fontvieille, et ils cherchaient un chef cuisinier.
Je suis venu avec Natsumi ma femme qui est chef pâtissière et avec mon second de cuisine avec qui je travaillais à Marseille. Ici, c’est un peu comme une grande famille, tout le monde s’entend bien.
En juillet 2020, un homme est venu manger au restaurant, il a posé plein de questions au serveur sur le chef, nous avons trouvé cela bizarre. Une semaine après, nous avons compris en voyant un tweet du Guide Michelin qui parlait de nous. Nous étions contents bien sûr, mais cela ne change rien, car nous essayons de travailler toujours au mieux pour nos clients, et non pour être dans le guide Michelin.
J’aime beaucoup cuisiner le porc français. Ici, le poisson, la viande, ce n’est pas la même chose qu’au Japon.
Un jour, j’ai fait du fromage de tête. Normalement, on jette le bouillon dans lequel on fait cuire la viande. Je l’ai goûté avant, c’était super bon. Ça m’a donné l’idée de faire des ramen. J’ai pensé qu’avoir un restaurant de ramen ce serait sympa même si j’avais zéro expérience des restaurants de ramen.
Comme Laurent voulait faire du business avec moi, en plus du restaurant de l’hôtel, on s’est associé.
Nous avons ouvert en 2020 à Arles le premier Mecha Uma, avec une cuisine japonaise simple. Puis un deuxième restaurant à Avignon en 2021 et ce printemps, un à Saint Rémy de Provence. Dans chacun, le chef et le responsable de salle sont japonais, mais comme j’aime mélanger, il y a aussi des français.
Faire la photo avec Laurent était une évidence. Il est mon patron, mon associé et mon ami. Moi je suis japonais, lui est français. Nous sommes différents mais complémentaires, et lui aussi est très positif. Cela nous permet de faire des choses entre le Japon et la France.
Un jour je suis cuisinier, un jour je fais du business, un jour je profite des saveurs, et peut-être le jour d’après je fais autre chose. Je suis curieux, je cherche, j’essaie. J’aime partager ma culture avec les clients.
Chaque matin, je vais chez les producteurs acheter des légumes, des fruits, du lait de chèvre, du miel de lavande. Ce sont toujours de bons produits, qui me permettent de faire une cuisine du terroir.
Il y a des choses différentes entre la France et le Japon mais je m’adapte. Et si je n’aime pas alors je rentre chez moi. Avec ma femme, nous sommes contents de vivre ici, nous essayons de toujours avoir du respect pour les gens et le pays qui nous accueille.
Je vis dans le présent, chaque jour est un bon souvenir. J’essaie de toujours avancer. Nous venons d’ouvrir le troisième Mecha Uma ce printemps, maintenant on va ralentir. J’ai d’autres idées dans ma tête. Je réfléchis, je réfléchis et un jour j’y vais !
Quand je visite les producteurs, surtout les bio, je vois plein de cageots de fruits et de légumes jetés car ils ne sont pas vendables ou qu’il y en a trop. Cela me pose problème, car ces produits sont coûteux. J’aimerais bien les récupérer pour en faire des tsukemono, des légumes macérés façon japonaise. Je n’en ai pas encore parlé avec Laurent, on verra d’ici deux ou trois ans.
Ma famille me manque, même si je vais la voir chaque année. La cuisine japonaise également, l’ambiance des restaurants, comme manger et picoler dans les izakaya avec mes amis jusqu’à six heures du matin, ce n’est jamais fini. Il n’y a pas ça en France, car les restaurants ferment à minuit.
Peut-être que plus tard, pour la retraite, je retournerai au Japon. Je ne pense pas passer toute ma vie en France, je suis quand même japonais. Même si on me dit souvent que je suis un Japonais bizarre. C’est bien de pouvoir vivre dans les deux pays.
En fait, je n’y ai jamais vraiment pensé. Je crois que j’irai habiter plutôt à la campagne, maintenant que je connais cette vie là.
Profiter de la vie comme on le fait en France, c’est ce que j’amènerai avec moi.
2 Comments
Bonjour
Nous vennons de San Franciso et Los Angeles dinner chez vous le 27 Juin
pour l’anniversaire de notre fils
En voyage dans la region pour un mariage!
Je viens de lire que vous avez travaille avec Patrick Jeffroy, un viel ami!
Amities confraternelles
Alain
Bonjour, le message est passé à Kohei, et noté dans son agenda ! Bonne visite.